24 mai 1900 – 31 octobre 1984

Cher Maître, cher Eduardo,

Je tremblais de peur (ou mieux: j’avais le «timor reverentialis»), mais aussi de joie en votre présence.

Aujourd'hui, à l'occasion du 33ème anniversaire de votre long périple, je veux profiter des "social networks" (une expression qui vous ferait beaucoup rire aujourd'hui), pour vous remercier publiquement.

Merci pour tous ces enseignements qui m'ont permis d'interpréter la myriade de personnages que j'ai eu la chance de faire vivre. En créant mon personnage, votre voix, vos indications, votre détermination et votre assurance, ont toujours été à mes côtés, surtout en début de soirée, avant de monter sur scène, quand le cœur bat très fort!! Comme cette nuit d'été à Ferrare en 1981, dans les coulisses, vous m’aviez encouragé à franchir cette petite ligne magique qui vous transporte de l'obscurité des coulisses à la lumière inexorable et mystérieuse de la scène.

Cher Maître, merci pour la patience que vous avez toujours eu pour moi et merci aussi pour vos reproches. A l'époque j'étais mauvais, mais aujourd'hui je reconnais que vous aviez raison, et j’ai beaucoup bénéficié d’être repris par vous sur le travail.

Je étreins bien fort et vous salue en sachant que vous êtes toujours à mes côtés dans ce chemin compliqué et fantastique qu’est le théâtre.

RECETTES TRANSMISE PAR MA CHERE PUPELLA MAGGIO

La première chose que Pupella me disait: "Genny, souviens-toi que cette omelette d'oignons doit être comme un dessert". Et elle avait raison!!

Choisir comme variété d’oignon la RAMATA DE MONTORO ou bien l’oignon DORE DE PARME.

Instructions: Couper les oignons à la main (un oignon par œuf). A côté, préparer un récipient d'eau où dissoudre une cuillère à café de bicarbonate de soude, afin d’éliminer l’acidité de l’oignon (et voici le petit secret), et laisser-y tremper les oignons en tranches pendant environ 20 minutes. Remuez de temps en temps.

N.B. une cuillère à café de bicarbonate par litre d'eau.

Une fois le temps écoulé, filtrez les oignons, rincez-les rapidement à l'eau courante et séchez-les avec un linge de coton ou de lin. Dans une poêle antiadhésive, chauffer l'huile d'olive extra-vierge et trempez-y les oignons séchés en les cuisant lentement jusqu'à ce qu'ils deviennent dorés. Eteignez le feu.

Battre les œufs, ajouter le sel et le poivre (selon votre goût), ajoutez deux cuillères à soupe de lait, et ajouter les oignons cuits après avoir égoutté l’huile. Mélangez bien les oignons dans les œufs battus. Ré-allumer le feu sous la poêle et si nécessaire ajouter un peu plus d'huile, versez le mélange œuf / oignons. Faites cuire lentement.

A ce stade, l’habilité consiste à retourner l’omelette sur elle-même sans la casser et former un rouleau qui pourra être coupé en tranches.

Continuer à cuire selon votre goût ... Pupella aimait l’omelette un peu roussie ... mais «juste en tout petit peu" comme elle disait.

Et maintenant, je vous souhaite bon appétit et si vous le voulez, faites-moi savoir .... . Ps. L’omelette doit donc ressembler à “un dessert”, parce que les oignons, avec le bicarbonate, s’adoucissent.

Bonne journée.

Aujourd’hui je veux vous parler de l'une des plus représentatives et talentueuses danseuses de music-hall français, une amie très chère, la grande ZIZI JEANMAIRE qui a 93 ans et vit à Genève.

Après six années d'études à l'école de danse à l'Opéra de Paris, Zizi quitte l’Opéra parce qu’il l'empêche de danser pour d'autres théâtres et commence ainsi une longue carrière de vedette qui aura succès sur toutes les scènes internationales. Elle rencontre ROLAND PETIT, chorégraphe au SARAH BERNHARDT destiné à devenir son mari et mentor pendant plus d'un demi-siècle. Tous deux connaitrons au ballet de Paris un succès mondial avec CARMEN, qui fait ses débuts à Londres en 1949, et deviendrons un des couples artistique les plus solides et appréciés de la danse. Pleine d’entrain et d’énergie, ironique, légère, JEANMAIRE est une femme de spectacle complète. Elle dansera aux côtés de stars telles que RUDOLPH NUREYEV et BARYSHNIKOV.

L'un des numéros les plus célèbres inventés par le couple ZIZI'-ROLAND sera "MON TRUC EN PLUMES" que vous trouverez ci-dessous. En dépit des problèmes physiques, elle continuera de danser sous la direction éclairée de PETIT, avec le même enthousiasme que jamais jusqu’aux années quatre-vingt-dix, exactement en 1997, quand je l'ai rencontrée pour la première fois.

C’était durant le Premio Internazionale dell’Operetta de 1997, année où j'étais l'un des protagonistes sur scène, que ZIZI JEANMAIRE avait été invitée avec son spectacle: les organisateurs avaient décidé pour l’occasion de récompenser la diva et voulaientt que la motivation du prix soit lu en français. Or, de tous les artistes présents, j’étais le seul à connaitre le français! Quelle chance!!! Grâce à cette opportunité de récompenser personnellement Zizì, je suis resté à ses côtés pendant trois jours et nous nous sommes liés d’amitié: une belle amitié qui dure encore aujourd’hui. Je t'aime beaucoup ma chère et unique ZIZI’!

Hier j'ai pris le bus pour aller au centre de Rome.

En dépit qu’il était 10 heures du matin et, je suppose, à cette heure-ci les jeunes devraient être à l'école, je vois un petit groupe de 5-6 garçons entre 15 et 16 ans littéralement avachis sur les sièges, les pieds en l'air, les regards arrogants, tandis qu'un d’eux fume sans être dérangé.

Aucun passager ne dit quoi que ce soit.

Je fais de même et me dirige vers le centre du bus.

Un arrêt plus tard, une femme âgée munie d'une béquille et en surpoids marche avec difficulté; elle est probablement poliomyélite car sa jambe gauche est d'au moins 20 centimètres plus longue que la droite. Avec un autre passager nous l'aidons à monter ces trois marches ridiculement hautes pour un moyen de transport public.

Le bus est plein, pas de place pour asseoir. La femme va à l'endroit réservé aux invalides, mais occupée par l'un des jeunes hommes décrits ci-dessus et demande poliment de pouvoir s’asseoir.

Le jeunet la toise de haut en bas, avec mépris, en mâchant son chewing-gum, et après environ 15 secondes qui semblent un siècle répond: « Avez-vous la carte des invalides? ».

Les jeunes rient, alors que les autres passagers, horrifiés, secouent la tête en signe de désapprobation, tout en restant en silence.

La femme répond: « S'il vous plaît, je voudrais m’asseoir. » L'autre continue: « Montrez-moi la carte .... mois aussi je suis malade .... Aujourd'hui, je me sens fatigué ... je me suis couché tard ". Du groupe s’élève un éclat de rire énorme, cruel, grotesque, tragique.

Je m’approche et je hurle: « Lève-toi et donne-lui ta place. » Un autre jeune me pousse: «Tu donnes des ordres à mon ami?».

Je suis tellement choqué que je dois me contrôler «ou je l'ignore ou je lui brise la figure», je pense en moi-même. Je n'aime pas la violence, mais je pourrais aussi bien l'utiliser: si je le dois, je frappe, et je frappe dur!

En fin de compte, une dame se lève et cède sa place à l’invalide.

Je me suis senti mal, toute la journée. Un sentiment de malaise, de honte, d'injustice, de consternation, d'impuissance ne m’ont pas lâché une minute.

Pourquoi? Pourquoi une telle indifférence, une telle cruauté? Pourquoi ce manque de respect minimal et, je dirais, de piété envers les plus faibles? Où a passé l’éducation la plus élémentaire?

Je me rappelle alors de certaines histoires que me raconte une amie prof remplaçante: les bases de l'éducation la plus élémentaire n’existent plus; l'enseignement est devenu impossible.

Je tenais à écrire cet épisode qui révèle, à mon avis, un malaise très profond de notre société et de nos jeunes. Je m’arrête ici et espère obtenir quelques commentaires. Plus tard je reprendrai la question.